Lucien Bodard raconte dans L'Enlisement comment un corps expéditionnaire magnifique a pu se faire écraser au bout de sept ans en Indochine par des guerilleros misérables et dépourvus de tout. Ce que l'on appelait en France la "sale guerre" avait été pour le Corps Expéditionnaire la "guerre heureuse". Le sang, la mort, le supplice, la volupté, la paresse, la "grande vie", le militarisme esthétique, tout cela est indiciblement mêlé. Mais c'était aussi l'Enlisement. L'on pacifiait vite, mais l'on n'arrivait pas à tuer la guérrilla. La mitraillette rapportait, l'Indépendance rapportait, la piastre rapportait, elle finançait la guerre de tout le monde. L'équilibre aurait pu durer longtemps. Mais en un mois, on allait tomber de l'enlisement dans l'orgueil à l'humiliation de la défaite. Après cela la guerre d'Indochine traînera, mais elle était déjà condamnée.