Cette anthologie réunit trois textes autour du corps et de la voix.
Le premier, Poétique du Petit Corps, est né d’une réflexion à propos d’un travail d’atelier théâtral sur le corps. Ne pouvant traduire mes impressions qu’en termes d'image face au corps de l’autre, lorsque le temps de l’écriture est venu, la forme poétique s’est imposée.
Ce texte peut être lu comme un long poème et/ou conçu comme un exercice dont le but serait d’aider l’acteur/danseur à acquérir la connaissance du corps en représentation. Il peut aussi donner lieu à un spectacle.
Dès que nous en parlons, dès que nous l’écrivons, le corps devient étranger, « extra-quotidien ». Il est cet objet complexe qui se définit par rapport à l’espace et au temps qui l’environnent. Les deux critères qui permettent l’approche du corps sont le mouvement et l’immobilité. Le corps est dynamique.
Le corps, pour exister, fait un long voyage. Il est l’objet de multiples traductions. Le langage dilate le corps, lui rend ses différents niveaux de perception, en fait un objet poétique. De cette poésie naissent des images, celles d’un corps-en-vie.
Le corps qui proposé ici est double. Il s’agit de deux profils. Celui de gauche est une description du mouvement. Celui de droite fait référence aux sensations que peuvent provoquer un tel mouvement.
Le corps crée les conditions de sa propre présence, conscient de ses potentialités. Le corps est actif parce que réceptif.
Le deuxième texte, Petite Musique du Corps, est né de la nécessité de faire parler ce petit corps.
Toujours sous la forme d’un long poème, ce texte explore le corps en train de dire.
Le cri est la première manifestation de la vie. Il est la trace organique du symbole.
Envers de la peau, le son construit une géographie sonore des profondeurs où le mot, puis la phrase prennent naissance.
Pour l’acteur, le mot devient matière. Dans un premier temps, le mot est déshabillé de son sens. Ce n’est qu’après avoir été « pris en bouche », respiré, goûté, mâché, digéré, malaxé avec les humeurs du corps, que le mot est restitué avec la signification que l’auteur a voulu lui donner.
Tout se passe comme si, dans le double mouvement de la respiration, le Réel entrait dans le corps et le corps en restituait la trace sous la forme du mot.
Pierre angulaire du sens, le mot appelle son semblable ainsi naît la phrase. Elle est ce ruban de mots qui dit la complexité du Réel. La phrase dit l’histoire du corps et le corps dit l’histoire des hommes.
Petit Cri Cherche Petit Corps est une pièce de théâtre écrite à partir des deux textes poétiques antérieurs, Poétique du Petit Corps et Petite Musique du Corps.
La fusion des images générées par le corps, et celles engendrées par la lettre et l’évocation du son, induit l’incarnation. Et la poésie s’est faite théâtre, le son s’est fait parole. Et le corps a pris son envol.
Petit Cri Cherche Petit Corps a été créé le 5 juillet 2009 au Café-Scène de Montfort, Montfort-en-Chalosse (40) avec Katia Thoumyre et Jean-Marie Tisserand et mise en scène par l’auteur.
Le texte est enregistré ou dit sur scène par un récitant. Deux acteurs/danseurs, un homme, une femme, évoluent sur scène. Ils content la périlleuse histoire de l’humanité faite de peur, de séduction, de haine et d’amour.
Ce "dialogue à 3" conte la naissance, la vie, l’amour, la mort.
L’immobilité et le silence sont les prémices du mouvement et du son. La naissance est une déchirure, un fier combat.
"Son cherche organe pour vie commune". Ainsi naît l’humanité.
Le O habite le ventre.
Le A vagabonde… Il est dans la poitrine. Il habite la gorge. Puis se répand dans la bouche.
Le I navigue dans le nez. Il s'évade dans les tempes.
Le dos recueille la pensée. La pensée, discours intérieur ininterrompu. Lieu de l’être
inachevé.
L’extérieur et l’intérieur du corps s’affirment, se séparent, s’affrontent, se séduisent et s’endorment "dans l’aube d’un baiser".
CorinneTisserand-Simon
30 novembre 2014