Plus le moraliste se rapproche de sa fin – dont il parle avec un détachement superbe –, plus son souffle d'écriture se fait à la fois précis et léger, comme animé d'un mysticisme vivant. Toutes ses forces s'y trouvent ramassées puis confondues afin de leur donner le raffinement de l'évidence. Élise est morte en 1970. En 1971 et 1972, Jouhandeau, alors âgé de quatre-vingt-quatre ans, vit seul avec le petit Marc dans sa maison de Rueil, assisté par son couple de domestiques portugais. Il voit peu d'amis, sort à peine, reçoit de rares intimes. Il se souvient. Il observe son visage et son corps face à la beauté des jeunes hommes qui continuent à l'adorer. Il écoute le merveilleux petit garçon qui est son double enfantin et le centre de sa vie. Il parle d'Élise avec respect, et même une admiration teintée de cruauté. Il évoque la mort de certains proches : Dita Parlo, Maurice Chevalier, Henry de Montherlant dont le suicide le bouleverse. Le grand âge, au lieu de dégrader l'écrivain, apporte à son style une transparence ainsi qu'une linéarité de plus en plus incisives.