La société médiévale apparaît souvent comme une société d’affrontement, distinguant le clerc du laïc, le supérieur de l’inférieur, le croyant de l’incroyant, le courtois du vilain, mais aussi le beau du laid. La littérature narrative des xiième et xiiième siècles n’échappe pas à cette antithèse et oppose le geste beau et bienséant au geste laid et inconvenant. Les auteurs rejoignent donc sur ce point les moralistes de l’époque qui tentent de définir le beau geste afin de concevoir une discipline du corps et une éducation du geste destinée à rehausser la vertu de l’âme. La vie quotidienne se trouve ainsi organisée jusque dans ses gestes les plus infimes — hygiène, manière de se tenir, de communiquer et même de se nourrir — et l’accent est mis sur un idéal de maîtrise de soi, de mesure, d’harmonie, en somme de contrôle permanent de l’individu sur ses moindres gestes.