Cet été 1969, à la fin d'une décennie qui a vu basculer les moeurs, a vu le monde changer sa couleur, et qui va être brutalement ramenée à la condition humaine la plus misérable, violence, folie et mort – ce à quoi elle aurait voulu échapper.
C'est la mort de Brian Jones, le guitariste fondateur des Rolling Stones, quelques jours avant que l'homme marche sur la lune, en direct sur toutes les télévisions du monde. Et à peine une semaine avant l'utopie Woodstock, de l'autre côté des USA, à Los Anges, Mulholland Drive, trois membres d'une communauté hippie dirigée par un nommé Charles Manson s'immiscent dans la propriété du cinéaste Roman Polanski et en égorgent les occupants, dont sa compagne Sharon Tate, 26 ans, enceinte.
Et c'est de toute cette mythologie soudée comme un monolithe qu'est fait notre présent. Certains des héros de Woodstock continuent se produire sur scène, et la dernière demande de libération conditionnelle de Manson a été rejetée le 11 avril 2011.
Et puis l'épilogue des sixties : on est le 6 décembre, sur le circuit de courses automobiles d'Altamont, où les Rolling Stones, accusés d'avoir trop engrangé de bénéfices dans leur tournée géante, ont voulu se rattraper par un concert gratuit, mais en ont confié le service d'ordre aux motards des Hells Angels. Là mourra Meredith Hunter, directement devant la caméra des frères Maysles (Gimme Shelter).
Tous les tenseurs de notre culture actuelle sont désormais au grand jour, ou plutôt exibés à même l'immuable nuit des hommes.
Alors c'est comme une histoire qu'on s'imagine connaître d'avance et par coeur, mais, si on la déplie, voilà une myriade de faits et de détails qui résonnent et interfèrent, et nous découvrons que nous en avons si peu, si peu...
Marc Villard est un maître de la fiction. Là (et nous le saluons avec une mise en 69 pages !), c'est la réalité même qui devient son terrain d'exercice. C'est fascinant, c'est brûlant, c'est urgent. Pensez, 1969, USA...
Réalisation graphique et couverture Roxane Lecomte (Digital Hat).