Rares sont les intellectuels dé droite qui osent rompre, ici et là, le silence des majorités conservatrices. Pour Thomas Molnar, l’impasse du monde actuel est celle de la gauche dont les idéaux, triomphant depuis deux siècles, n’ont abouti qu’à des projets coupés de la réalité, sources de discorde, de confusion, d’insécurité ou de régression. Un peu partout la gauche traditionnelle au pouvoir se voit contestée par son ultra-gauche et prisonnière d’une classe intellectuelle ennemie du concret, pour qui l’utopie constitue la solution finale. Cette impasse est d’abord théorique : la faillite de la gauche ne tient pas à une incapacité de gouverner, mais à son horreur du statu quo, de toute situation qui doit, pour elle, céder sur le champ au projet, au mouvement, à des idées neuves, des combinaisons impossibles, des solutions inédites, une humanité jamais vue, un “devenir” auquel l’Etre est sans cesse sacrifié. La gauche, dans ses combats fratricides et ses entre-déchirements, oublie parfois qu’elle n’a pas d’ennemis que dans ses propres rangs : en voici un qui, d’en face, lui fait un procès serré.