Jaurès aimait citer Eschyle et Sophocle : « La poussière est la sœur altérée de la boue » – « Les affaires », le scandale de Panama, la corruption capitaliste, sont les causes principales des attentats anarchistes de 1893-1894. On connaît sa lutte courageuse pour la réhabilitation de Dreyfus. Jaurès prédit aussi qu’une guerre mondiale ferait surgir, sur des millions de cadavres, une révolution, et il lutta de toutes ses forces pour empêcher le déclenchement du carnage. Sa voix ne fut pas entendue. Elle fut interrompue par un assassin victime des campagnes de presse nationalistes. Jaurès avait pressenti qu’il pourrait être un jour abattu par l’un de ceux qu’il aurait voulu affranchir. Son œuvre gigantesque, dont on commence à percevoir l’importance prophétique, demeure si belle qu’un Barrès, son adversaire, notait : « Est-il si déraisonnable d’admettre que Bossuet fut un Jaurès ? » Oiseau rare, Jaurès l’est aussi comme homme politique intègre : « honnête homme habile à parler ». Sa formule, « le courage, c’est de chercher la vérité, et de la dire », fait écho à Rousseau. Michel Launay suggère que l’éloquence de Jaurès, bien que classique, est d’une étonnante actualité.