Malgré la diversité de ses opérations, de ses objets et de ses motifs, notre vie mentale nous apparaît tissée dans un même matériau. Si étranges que nous en semblent certaines de ses manifestations, nous nous les attribuons. Il faut le reconnaître, nous sommes cette étrangeté et nous pourrions nous étonner autant d’être en mesure d’accomplir un raisonnement mathématique, de tenir un discours logique, d’éprouver une émotion en voyant un tableau, en écoutant un morceau de musique, en nous promenant dans une forêt, que d’avoir été réveillé la nuit précédente à la suite d’une confidence un peu distraite que nous aura faite une femme. Nous sommes ce raisonnement, ce discours, cette émotion, cette angoisse qui nous oblige à nous demander si elle est le signe d’un amour ou le rappel pathétique d’un événement ancien, seul vestige de mémoire d’une catastrophe affective perdue dans la nuit des temps.