Un pamphlet dénonçant la manière dont la prétention à l'humanité, la bonté, la charité, la compassion, a défiguré la politique- ses choix, ses risques, ses enjeux. Notre République se soucie désormais moins de la chose publique que de la gestion publique de la chose privée: société lacrymale avancée dont les gouvernants sont devenus les aumôniers. Grands ordonnateurs des pompes doloristes, ils courent au devant des malheurs: moins ils sont responsables, plus il leur faut se mobiliser! Parades émotionnelles, armes de déploration massive, tout conduit à la surenchère dans la compétition victimaire du côté des gouvernés et dans la compétition compassionnelle du côté des gouvernants. A défaut de pouvoir accorder à tous l'envié statut de la fonction publique, l'Etat ne se montre pas chiche pour concéder celui de l'affliction publique. Nous voici de plain-pied dans la démocratie d'émotion, grimace de la démocratie d'opinion, elle-même grimace de la démocratie représentative. Demain, une démocratie de la niaiserie, en attendant celle du gâtisme?