Protestant intransigeant, Agrippa d'Aubigné (1552-1630) s'est engagé avec passion dans les guerres de religion. Il est mêlé à tous les aspects de la vie de son temps: les tumultes de son existence en reflètent les drames.
Sa vie est un roman de cape et d'épée. A la cour du roi Henri III, il côtoie les plus grands personnages: il en partage les plaisirs, il en dénonce les bassesses et les intrigues. Compagnon d'Henri IV à qui le lie une amitié passionnée traversée de brouilles retentissantes, il l'aide à s'évader du Louvre et combat à ses côtés jusqu'à son avènement.
Il aime se battre. Il nous entraîne dans les camps, les batailles, les coups de main, les sièges avec leur cortège d'horreurs et de misères accablant les humbles, qu'il est l'un des rares à plaindre sincèrement. Peu satisfait de l'Edit de Nantes, il continue, dans un âge avancé, de combattre fougueusement ceux de ses coreligionnaires que la prudence incite à la conciliation.
Mais cet homme de guerre est aussi l'un des plus grands écrivains français. Il met au service de sa foi son épée, sa plume, sa parole. D'une culture prodigieuse, ce soldat est le poète baroque de beaux vers d'amour et l'auteur inspiré de la grande épopée des Tragiques. Il compose une Histoire universelle. Pamphlétaire ardent, il multiplie les épigrammes satiriques en latin et en français. Il compose un roman picaresque haut en couleurs et inaugure le genre autobiographique. Déçu par Louis XIII, persécuté par lui, condamné à mort, il s'exile à Genève, où il meurt, pour ainsi dire, la plume à la main.
Madeleine Lazard, professeur émérite à la Sorbonne nouvelle, est présidente honoraire de la Société d'étude du XVIe siècle et présidente de la Société internationale des amis de Montaigne. Elle est l'auteur de nombreux ouvrages et articles concernant la littérature de la Renaissance, notamment le théâtre, la condition féminine, l'oeuvre de Rabelais et les mémorialistes et a publié la biographie de Montaigne et de Brantôme chez Fayard.