En relisant l'oeuvre d'Ibn Khaldûn, historien du XIVe siècle, Hamit Bozarslan en fait ressortir toute l'actualité et la justesse d'analyse. La chute des régimes de Ben Ali et de Moubarak ne trouve-t-elle pas une explication dans ce qu'il décrit comme l'inévitable " routinisation " du pouvoir, menant à la troisième et ultime phase de toute domination ? Théoricien de la civilisation, Ibn Khaldûn construit une analyse du pouvoir fondée sur la mise en évidence de cycles et de contradictions. Aucune cité ne peut se constituer sans la violence, mais elle ne peut pas non plus vivre avec, dans un va-et-vient permanent entre pacification et brutalisation. Conquête, domestication, puis exercice tyrannique du pouvoir : telles sont les trois phases de domination menant inexorablement à la chute d'un pouvoir, laissant la place à d'autres ambitions de puissance. L'étude révélatrice de Hamit Bozarslan sur un penseur d'une envergure digne de Machiavel illustre la pertinence d'une pensée qui n'a pas fini de nous interpeller