Quels sont donc les effets de l’écriture sur le régime intellectuel des Grecs? Une écriture interrogée dans sa dimension anthropologique: comme une activité cognitive, et quand elle prend une place majeure dans la vie sociale et dans les pratiques politiques. Entre 650 et 450 av. notre ère dans les cités de la Grèce, l’écrit monumental et public conquiert son autonomie ; il produit des objets inédits, favorise l’avènement de la publicité, inaugure un régime nouveau pour l’activité intellectuelle. Comment l’écrit devenu autonome s’affirme-t-il pratique de l’intellect ? Quels sont les objets façonnés par l’exercice graphique? Quelles possibilités nouvelles ces nouveaux objets proposent-ils à l’intelligence de ces Grecs si peu répétitifs ? Autour de ces questions, un petit groupe de chercheurs -français, italiens, américains- découvre la présence de scribes entre l’Acropole, Olympie et les montagnes crétoises; l’action souvent complexe de législateurs anonymes ou trop connus, et comment l’écriture des lois est constituante du politique; comment, également, sur ce terrain l’écrit affirme sa présence et ses vertus de rigueur et d’exactitude. Enquête qui a une dimension d’histoire sociale: l’avènement des archives; les distances entre le droit et l’écriture; les marchands, l’économie et le système de numération alphabétique. Mais dans la visée, il y a les hauts savoirs fléchés par l’écrit: la géométrie dessinant et écrivant, explorant les propriétés des figures et mettant la démonstration par écrit; la géographie avec la carte et ses contraintes de raisonnement imposées entre écrire le monde et dessiner la terre habitée; la médecine avec son projet d’écrire afin de décrire, d’inventer par le stylet et le style des Epidémies la maladie dans ses purs symptômes. Avec ses tracés bibliographiques, ses indices offerts au chaland, l’ouvrage ainsi paré devrait servir de livre-outil pour d’autres ateliers.