Dans la famille Adler, il y a le grand-père, Melech, figure du ghetto juif de Montréal et gardien des traditions qui préside d’une main de fer aux destinées du clan et du dépôt de charbon qu’il possède. Il y a le fils, Wolf, bon à rien qui passe son temps à jouer aux cartes et à décevoir sa femme de toutes les manières possibles. Lui qui deviendra, par un fâcheux quiproquo – ou un heureux hasard, c’est selon –, l’idole de tout un quartier. Et, surtout, il y a le plus jeune, Noah, l’idéaliste qui ne supporte plus le carcan de son milieu et l’hypocrisie de ses aïeux. Noah, qui choisira de rompre avec ses proches pour tenter de forger sa liberté au volant d’un taxi et sur les bancs de l’université. Il ne tardera toutefois pas à découvrir que le monde étranger des goyim n’est pas moins rigide et codifié que celui qu’il a quitté. Paru en 1955, Fils d’un tout petit héros est le livre qui a fait connaître Mordecai Richler à l’étranger. Avec cette saga familiale au réalisme accrocheur et à la satire mordante, l’auteur nous plonge dans le Montréal de l’après-guerre, celui des enseignes au néon de la rue Sainte-Catherine et des salles de billard enfumées de la Main, des appartements sans eau chaude du Mile End et des bars huppés du centre-ville, un Montréal bigarré où la révolte acharnée d’un jeune homme ne suffira pas à faire tomber les murs entre les communautés. Ce roman n’est ni plus ni moins que l’acte de naissance d’un immense écrivain. « Le roman admirable de Richler recrée les rues grouillantes, les passions frustrées […] du quartier juif de Montréal […]; il ne fait aucun doute que le talent de l’auteur est prodigieux. » – Times Literary Supplement