Pourquoi poser aujourd’hui la question de la responsabilité ? Parce qu’elle se pose en des termes relativement nouveaux, aussi bien dans le champ juridique (ce qu’on appelle « le droit de la responsabilité ») que sur le plan moral ou philosophique. On ne peut pas être responsable de tout, mais on ne peut pas non plus se dérober à ses responsabilités. Sans doute est-on allé trop loin dans la dilution des responsabilités : dans le domaine du droit, avec le développement de la « responsabilité sans faute », dans celui de la politique, avec le rôle dévolu aux experts et aux « technocrates », dans celui de l’histoire, avec une certaine tendance à l’oubli ou à l’occultation du passé. Mais il ne faudrait pas non plus que la volonté de trouver des « coupables » se confonde avec la recherche de boucs émissaires. Aussi convient-il de reconstruire une morale de la responsabilité qui permette aux hommes de reconnaître, parmi les innombrables conséquences de leurs actes, celles qu’ils peuvent légitimement assumer.