Le livre du rabbin vénitien Léon de Modène, publié à Paris en version italienne en 1637 sous le titre de Historia de gli riti hebraici, présentait à un large public les rites et les coutumes des Juifs de son temps. Il prenait place dans tout un courant de redécouverte de l'Orient, des peuples étrangers et des religions non chrétiennes. Pour assurer sa diffusion en France, le grand érudit et hébraïsant Richard Simon en fit une traduction qu'il publia en 1674. Il la faisait précéder d’une préface où il manifestait sa remarquable connaissance du judaïsme et soulignait l’intérêt que, comme théologien et savant catholique, il portait au peuple juif. Pour combler les lacunes du livre du rabbin vénitien, il joignait à sa traduction deux importants suppléments, l’un consacré aux Caraïtes (Juifs qui s’appuyaient exclusivement sur l’écriture et à ce titre lui paraissaient préfigurer les protestants), l’autre aux Samaritains. En 1681, Richard Simon réédita son livre et y ajouta une seconde partie où il dégageait les rapports de la doctrine et de la liturgie chrétiennes avec le judaïsme. C’est cette version complète qui est ici publiée. Comparer l’œuvre de Léon de Modène et celle de l’oratorien français permet de comprendre comment le public du XVIIe siècle connaissait le judaïsme et comment un catholique cultivé et d’esprit libre pensait les rapports entre les deux religions et les deux peuples. Léon de Modène est en effet un bon témoin de la façon dont les communautés juives se représentaient elles-mêmes et se faisaient connaître à l’extérieur ; quant à Richard Simon, au delà des questions théologiques et liturgiques, il manifestait pour les coutumes juives une curiosité quasi ethnographique, annonçant, dans le catholicisme même, un état d’esprit appelé à se développer considérablement.