" L'écriture spécifique d'habitude mise en œuvre pour parler des combattants des tranchées, des femmes en deuil ou des enfants de la guerre, j'ai tenté de l'appliquer à ceux auxquels, d'une manière ou d'une autre, je tiens. Il se trouve que sur trois générations en demeure une trace écrite.
J'ai souhaité rester sur les terres de l'Histoire. Mais celles-ci sont étendues et, dans bien des directions, les frontières deviennent poreuses au point d'être parfois peu discernables : c'est sur ces frontières-là que je me suis déplacé en m'éloignant du plus qu'il m'était possible mais sans perdre tout à fait des yeux mon point d'ancrage. J'espère n'avoir pas franchi les bornes – mais si c'était le cas, je n'en aurais pas trop de regrets. Ce sont les risques de l'expérience.
Même si elles s'y apparentent parfois, les pages que l'on va lire ne constituent pas un récit de famille : je m'en suis tenu à ce que la Grande Guerre a fait aux miens, à la manière dont elle a traversé leur existence, quitte à inscrire ses effets au-delà même de leur propre vie. "
Stéphane Audoin-Rouzeau