Cette lecture critique d'Empireet deMultituded'Antonio Negri et Michael Hardt, renoue avec la meilleure tradition et la vivacité de la discussion théorique et politique.
Le nom de Marx donne aujourd'hui lieu à d'étranges renversements. Tandis que certains libéraux rendent des hommages appuyés à l'auteur duCapital, nombreux sont ceux qui à gauche ne savent que faire d'un héritage jugé encombrant. L'indifférence feinte, le dogmatisme, tout comme la volonté d'ignorer, reconduisent les errements du passé et perpétuent l'impasse actuelle.
C'est le mérite de Michael Hardt et de Antonio Negri que de refuser une telle attitude en entreprenant de réviser le marxisme d'une façon créatrice et originale.EmpireetMultitudemarquent en effet un moment important dans le réveil d'une pensée radicale. Ils frappent par leur ambition de repenser le passage au communisme à un moment où les mots de " révolution " ou de " communisme " paraissent frappés d'un discrédit irrémédiable.
Sauver Marx ?restitue la cohérence théorique de ce nouveau marxisme, en remontant à ses sources et en mettant en évidence ses limites : difficulté de penser le sujet politique à l'ère de la mondialisation, reconduction de la thèse d'un " moteur " de l'histoire, conception unilatérale des mutations de l'ordre productif. De telles limites renvoient aux limites mêmes du marxisme : aussi est-il vain de vouloir sauver Marx des difficultés de sa propre pensée.
Pour les auteurs de ce livre, qui entend renouer avec la meilleure tradition de la discussion théorique et politique, ce que désigne toujours le nom de Marx - la critique rigoureuse du capitalisme - ne saurait donc être confondu avec le marxisme comme discours sur l'Histoire.