Il y a des livres qui sont tout entiers comme un bonheur d’expression. Cherchez l’auteur, ce n’était pas un écrivain. C’était, simplement, un être humain qui a éprouvé, un jour, la nécessité absolue de parler. Cette nécessité que nous portons tous en nous, à des degrés divers, trouve ici le ton juste et ne s’en départit jamais. Les dangers inhérents à ce genre d’ambition — lenteurs, mélo, attendrissement sur soi-même — sont surmontés sans artifices, sans concessions, dans un climat d’ingénuité tendre et de grâce heureuse qui confond en admiration. Voici un livre nu, dépouillé de sensiblerie, vrai jusqu’à la cruauté — puisqu’il faut bien toujours se heurter à la cruauté et à la bêtise — offert comme un bel ex-voto à notre émotion, avec des couleurs charmantes et dans le chagrin une noble fierté. Une tranche de vie sans naturalisme, aux pleurs brouillés d’éclats de rire très doux. Michel Déon.