Comment les administrations s'intéressent-elles aux sciences sociales, savoirs critiques par vocation, et jusqu'à quel point s'en accommodent-elles ? Une histoire de ces interactions sur les dernières décennies.
Les rapports entre État et sciences sociales offrent un terrain d'observation privilégié pour étudier l'évolution des arts de gouverner contemporains. Cet ouvrage retrace l'histoire des organismes de commande et de financement de la recherche en sciences sociales dans les administrations françaises depuis les années 1960 et il en propose un premier bilan. Que se passe-t-il, en effet, à l'interface d'administrations en quête de savoirs opérationnels et de chercheurs acceptant de répondre à la demande publique ? Depuis les années 1960, en France, l'État soutient le développement d'une " recherche publique incitative ", espérant ainsi mieux connaître les phénomènes sociaux et surtout agir de façon plus éclairée. Dans quels contextes, à quelles fins et sous quelles formes ce " pilotage " s'est-il institutionnalisé ? Concrètement, comment les administrations se sont-elles intéressées aux sciences sociales, critiques par vocation, et jusqu'à quel point s'en sont-elles accommodées ? De leur côté, soucieux de ne renier ni la rigueur scientifique ni l'autonomie des savoirs et des disciplines, quelles relations les chercheurs ont-ils entretenues avec de telles commandes ? Alors que l'État est resté l'acteur majeur de leur professionnalisation et du financement de leurs activités, pourquoi et sous quelles conditions ont-ils accepté de réaliser des travaux suscités par les administrations, pour quels usages et avec quel impact ? Réunissant dix-sept contributions originales, cet ouvrage inscrit ces " interfaces organisées " dans les conflits politiques, idéologiques, institutionnels et professionnels qui ont traversé la Ve République.