On croit souvent que la notion d’Europe, conçue comme un ensemble politique, n’est apparue qu’après 1945. Or il n’en est rien. Le sentiment d’une certaine forme de communauté politique unissant les Européens, d’un Ordre européen, a surgi bien plus tôt, dès le XVIe siècle. Les travaux rassemblés dans cet ouvrage montrent que la notion d’Ordre européen est restée permanente jusqu’à ce que les deux guerres mondiales aient fait douter les Européens d’eux-mêmes. Cette notion était fondée au départ sur les valeurs de la Chrétienté, par la suite sur les valeurs libérales issues des Lumières et sur l’ensemble juridique progressivement construit depuis les traités de Westphalie, approfondi par le Congrès de Vienne, perfectionné tout au long du XIXe siècle et qui fut modifié mais non point aboli par les Traités de 1919, et qui survécut même à 1945. L’Ordre européen n’était pas simplement un équilibre mécanique entre les puissances, c’était un équilibre organique, reposant sur une unité de civilisation. En apparence la notion d’Ordre européen, généralement contestée après la catastrophe des deux guerres mondiales, paraît dépassée avec les progrès de la Construction européenne depuis les années cinquante. En fait elle n’a jamais totalement disparu, même après 1945, et elle retrouve son actualité avec la fin de la Guerre froide et l’établissement d’une architecture paneuropéenne de sécurité, concernant tout le continent, au-delà des limites géographiques de l’Union européenne.