Dans « Grandes fortunes », Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon entreprenaient un voyage quasi ethnologique à travers le monde secret de la grande bourgeoisie traditionnelle. Il y était question de ces familles dans lesquelles la patine du temps efface les traces des efforts de la conquête, où l’on naît avec un destin tout tracé. Aujourd’hui, ils s’attaquent à la « première génération », celle de ces hommes qui, partis de rien ou presque, sont arrivés à des niveaux de fortune hors du commun. Pour la plupart entrepreneurs, ils expliquent leurs motivations, les raisons de leur ambition, les clefs de leur réussite. Ils s’interrogent aussi sur la transmission de leur patrimoine, sur la manière de créer à leur tour une dynastie, de légitimer l’acquisition du capital « économique » par celle du capital « symbolique », relations, œuvres d’art, appartenance à des cercles… Comment, en un mot, passer du statut de nouveau riche à celui de grand bourgeois. Pour cela, en effet, il ne suffit pas de détenir plusieurs centaines de millions, voire plusieurs milliards de francs, mais il faut un réseau d’alliances familiales, de relations, un vernis culturel, qui seuls s’acquièrent avec le passage des générations. Ce qui ne va pas toujours sans heurts, car les représentants de la bourgeoisie traditionnelle n’accueillent pas toujours volontiers ces intrus. Fidèles à leur méthode habituelle, les auteurs se sont livrés à une enquête approfondie ; ils ont longuement questionné les « nouveaux patrons », ont eu accès aux informations privilégiées des banques qui organisent leurs successions, ont croisé les sources et les témoignages, pour finalement écrire un document très vivant qui nous plonge au cœur d’un milieu particulièrement fermé.