Plaire ou déplaire – Jean-Pierre Chevènement n’aime pas plaire. Quand il n’est pas content, il le fait savoir. Quand il a une idée en tête, il ne l’a pas ailleurs. Depuis quarante ans, il martèle que la République française a besoin d’autorité et que le modèle doit venir de haut. Sa ligne n’a jamais varié, ce qui lui confère une aura particulière dans notre France post-janvier 2015, brouillée avec ses repères républicains. Première leçon : « L’école est faite pour transmettre le savoir, le sens de notre histoire, le patriotisme, le civisme. Si on se décharge sur l’élève du soin de construire ses savoirs, tout est faussé. » Michel Onfray n’a pas peur de déplaire. Dans son article « Marx augmenté du Coran », il interroge le rapport entre la gauche française et l’islam. « Par anticapitalisme et anticolonialisme, la gauche islamophile se fait anti-sémite et anti-sioniste, misogyne et phallocrate, homophobe, puis théocratique : elle abolit tous les combats qui furent ceux de la gauche issue de la Révolution. » Vertigineux. L’armée française n’a plus peur de plaire ou de déplaire. On mesure subitement son impérieuse nécessité quand les ennemis de la République attaquent le sol national. Elle est à l’honneur dans ce numéro de mai. Mais l’armée française est-elle prête à affronter ses nouveaux enjeux ? Sait-elle s’adapter aux groupuscules terroristes et aux milices fanatiques dans cette « guerre asymétrique » que décrit Renaud Girard, reporter de guerre, qui a vu sur le terrain les militaires évoluer face à l’ennemi ? Oui, répond le général Bentégeat, ancien chef d’état-major des armées. À condition que les militaires et les politiques fassent preuve de confiance réciproque. À condition aussi de dépenser les sommes nécessaires à sa modernisation, rappelle François d’Orcival : « les avions ravitailleurs sans lesquels nos Rafale et Mirage ne pourraient pas bombarder leurs objectifs en Irak ou dans le Sahel ont plus de 50 ans »... Et à condition que « l’Europe de défense ne soit pas l’alibi du déclin », poursuit Christian Malis. Aujourd’hui la guerre mondiale « est en miettes », constate Michel Goya, ancien colonel des troupes de marines : « Sur les quatre cents soldats français tombés au combat, aucun n’a été touché par un projectile issu d’une armée régulière. » Sur le sol français enfin, la lutte contre le terrorisme, rappelle Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, « est un enjeu sécuritaire mais aussi une mise à l’épreuve. Un test pour notre société ». Allons-nous le réussir ? Quitte à déplaire aux ennemis de l’autorité. Valérie Toranian