Hier mythe à la mode, le tiers mondisme est aujourd'hui contrebattu et dénoncé. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les mouvements de libération nationaux (Viêt Minh, F.L.N. algérien, etc.) profitent de l'affaiblissement de l'Europe et de l'esprit du temps, ils imposent l'indépendance du monde asiatique et africain. L'européocentrisme, naguère triomphant, est contesté et rejeté. C'est l'émergence de peuples conquis, dominés, qui furent longtemps cantonnés dans ce que le grand écrivain mexicain Octavio Paz a nommé les faubourgs de l'histoire : qu'il s'agisse de l'Égypte, de l'Inde, du Maghreb, de l'Angola, du Mozambique, et autres. Leur réapparition violente, en tant que sujets de l'histoire active, est une réalité majeure de notre temps. Il n'est pas possible de sous-estimer l'importance de la fin de la période coloniale, de la prise de conscience des rapports Nord-Sud et de la situation particulière des pays d'Asie, d'Afrique, du Moyen-Orient et d'Amérique latine (Chili, Bolivie, Brésil, etc.). Désormais, le reflux de l'idéologie tiers-mondiste est à peu près total. Ce phénomène est dû à une conjonction de facteurs : fin de l'illusion lyrique (Algérie, Cuba, Palestiniens, etc.) ; émergence d'États dont la nature est tyrannique ou totalitaire (Ouganda, Guinée, Cambodge de Pol Pot, Iran de Khomeny) ; oppression de minorités (Kurdes, comme hier Arméniens, etc.) ; développement économique médiocre, et réalités politiques aux antipodes le plus souvent des déclarations de principe. Ce reflux est aussi dû à une meilleure appréciation du totalitarisme soviétique, et de l'échec de l'utopie chinoise. Il est dû, enfin, aux conséquences multiples de la crise économique, et du renforcement de la puissance militaire de l'U.R.S.S. et de l'opposition qu'elle suscite (Afghanistan, Pologne, etc.). Le présent ouvrage évalue, pour la première fois, ces thèmes sans manichéisme et regroupe (dans une seconde partie) une série de textes, de 1965 à nos jours, qui retracent un itinéraire et une époque à travers le tiers monde.